Vous êtes particulièrement engagé, aux côtés de Mathieu Hanotin, Président de Plaine Commune et maire de Saint-Denis, en matière de lutte contre l’habitat insalubre. Comment cela s’illustre-t-il concrètement dans les actions de cet Établissement public territorial (EPT) ?
C’est en effet une des grandes priorités des maires du territoires de Plaine Commune au titre de l’aménagement et de l’habitat et en lien avec leurs services d’hygiène municipale. Elle s’appuie sur un équilibre nécessaire entre ce qui relève des politiques de lutte contre l’insalubrité et les politiques de l’habitat.
Et pour cause : nous intervenons souvent sur des situations parfois lourdes (immeuble en péril, copropriété dégradée, opération de recyclage urbain) nécessitant parfois des acquisitions publiques par voie de négociation, de préemption voire expropriation pour mener à bien des projets de requalification ou de restructuration urbaine, par des bailleurs sociaux ou des promoteurs privés. Nous portons en ce sens des opérations d’aménagement multisites, via la SOREQA, l’aménageur de la collectivité.
Notre priorité c’est l’état du bâti. Le recyclage étant le dernier recours. En amont nous accompagnons autant que possible les copropriétés, nous les informons sur la réglementation, les aidons à rechercher de subventions notamment auprès de l’ANAH et de l’EPT Plaine Commune dans les secteurs des Opérations Programmées d’Amélioration de l’Habitat (Opah) s’agissant des propriétaires privés, et si nécessaire, nous prenons les arrêtés adaptés pour protéger les habitants.
De manière générale, quels sont les principaux besoins exprimés par vos administrés en matière d’habitat ? Leurs attentes ont elles évoluées ces dernières années ?
Les besoins sont variés. Nous sommes un territoire marqué par le poids du logement social ; un logement sur deux, relève du logement social dans toute sa diversité, auxquels se rajoutent 4000 places d’hébergement d’urgence.
S’agissant des locataires du parc social, leurs attentes concernent principalement l’entretien du parc, voire sa réhabilitation. C’est en ce sens que nous menons des projets d’envergure, avec l’ANRU ou hors ANRU. Pour l’Office public du territoire, Plaine Commune Habitat c’est près de 1 milliard d’investissement sur 10 ans en travaux, réhabilitations et constructions neuves. Nous veillons aussi à diversifier les types de logements pour accueillir des familles qui n’arrivent plus à se loger dans le parc privé du fait de l’augmentation des prix de l’immobilier, et leur offrir un véritable parcours résidentiel. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous investissons aussi massivement dans l’accession sociale à la propriété.
Notre objectif est de construire 3500 logements par an et nous souhaitons en dédier 20 % à l’accession sociale à la propriété (soit 500 à 700 logements), en BRS majoritairement. C’est en ce sens que nous avons créé en 2022 l’Organisme Foncier Solidaire (OFS) de Plaine commune. A ce jour nous avons 1000 logements en développement dont 400 en commercialisation.
De quels leviers dispose l’EPT Plaine Commune pour répondre à ces demandes liées à la qualité et la durabilité des logements ?
Dans le cadre de nos programmes de construction, nous portons des exigences fortes sur la qualité de l’habitat, tant du point de vue de l’habitabilité des logements que de la durabilité du bâti.
Pour accompagner cette ambition, nous avons créé une « charte promoteurs », appelée « convention qualité construction neuve », et qui s’applique aux opérations des bailleurs sociaux et des promoteurs avec le même niveau d’exigence.
Nous avons révisé cette convention en 2023 pour renforcer ces exigences sur la qualité des logements (taille minimale, espaces extérieurs, etc.), les exigences environnementales des constructions et garantir la bonne vie des copropriétés produites. Notre référentiel s’appuie sur celui de NF Habitat avec des prescriptions et recommandations spécifique à notre territoire. Le cadre est clair : nos réalisations doivent être en conformité avec les certifications réalisées par Cerqual.
Au-delà du contrôle lié à la certification, nous veillons à intégrer en amont un maximum de critères dans nos fiches de lot. Sur notre territoire, un logement sur deux, sort en opération d’aménagement. Dans une ville comme Saint-Denis, ce sont même 80% voire 90% des logements qui sont produits en ZAC. Nous avons donc la capacité à contrôler et encadrer la qualité des logements que l’on souhaite produire, maitriser les coûts de construction, ou encore la qualité architecturale.
C’est un levier important au regard du volume de logements réalisés.
Indirectement, cela dicte aussi la norme dans le diffus et devient au fil du temps un référentiel de plus en plus intégré par les promoteurs. Tout le monde le respecte même si notre convention n’est pas juridiquement opposable ; nous avons néanmoins retranscrit tout ce qui pouvait l’être réglementairement dans notre PLU qui lui, est opposable.
NF Habitat-NF Habitat HQE, la certification de référence des logements en France fête ses 10 ans. Quelles améliorations concrètes la certification NF Habitat – NF Habitat HQE a-t-elle apportée selon vous à la qualité des logements en France ?
Cette certification rejoint pleinement la préoccupation qui est la nôtre quant à la qualité des logements produits, le fait qu’ils soient habitables et de qualité, respectueux de l’environnement avec un impact carbone le moins lourd possible.
On s’en est d’ailleurs beaucoup inspiré pour établir la dernière version de notre référentiel de notre « convention qualité construction neuve » et la certification NF Habitat HQE est de fait, intégrée dans notre propre certification Plaine Commune.
Dans quelles mesures la certification NF Habitat est-elle un outil pertinent pour répondre aux attentes des habitants et aux enjeux actuels (environnement, climat…) ?
Oui, c’est un outil pertinent et un point de repère pour les accédants qui, par définition, ne sont pas sachants. Ce n’est pas donné à tout le monde d’évaluer la qualité du logement produit et de savoir s’il est fonctionnel.
La certification NF Habitat HQE va dans ce sens et donne des points de repères dans un marché complexe et varié.
C’est aussi un repère pour les élus, ou plutôt une garantie de qualité des logements produits.
C’est donc une bonne chose. Je ne fais pas partie de ceux qui pensent que les normes tuent la construction. On a besoin de points de repères et d’ambitions sur le bâti au stade de la production.
Mais aussi au stade de l’exploitation. Cela joue sur le niveau des charges, la maîtrise des consommations d’énergie, la durabilité des bâtiments et leur performance énergétique. Dans un contexte économique très tendu comme celui que nous traversons, c’est très important.
Quels sont les grands défis de Plaine Commune en matière de qualité de l’habitat dans les prochaines années ?
Comme je vous le disais, nous avons révisé nos référentiels et notre charte en 2023. Il ne faut pas changer les règles du jeu trop souvent. Il faut de la stabilité pour que cela produise des effets dans le temps.
Mais nous continuons d’accompagner ces ambitions en matière de qualité de l’habitat en fonction de l’évolution de la Réglementation Environnementale, de manière à limiter le plus possible notre impact carbone.
Au-delà du bâti, nous sommes très engagés en matière d’énergie avec un réseau de chaleur urbain qui continue de se développer et qui se décarbone. Nous sommes ainsi à plus de 2/3 d’ENR sur notre réseau de chaleur urbain.
Plaine commune est le 2ème réseau de chaleur urbain d’Ile-de-France. Cela nous permet de maitriser les coûts de l’énergie notamment par le développement de la géothermie.
Enfin nous souhaitons encore davantage investir dans les prochaines années en matière de réemploi de matériaux et d’économie circulaire. C’est désormais une démarche incontournable pour tous les acteurs de l’habitat, institutionnels ou privés.
L’impact de la construction sur l’empreinte carbone est réel et nous visons à être le plus vertueux possible avec l’utilisation de plus en plus importante du bois.
Malgré le contexte très tendu, la hausse des coûts des matières premières et de l’énergie, nous ne voulons pas revoir à la baisse nos exigences en termes d’habitabilité.
Nous veillons donc à trouver un équilibre entre les prix de marché, les coûts de construction et la qualité des logements produits. Nous veillons aussi à ce que la qualité de l’habitat rime avec un cadre de vie agréable comprenant des espaces verts, des commerces, des équipements publics et des transports. On ne peut plus penser qualité de l’habitat par le seul prisme du logement. C’est notre ambition pour le territoire de Plaine commune pour les années à venir.