L’Alliance HQE-GBC est au cœur des enjeux d’habitat et d’aménagement durables depuis de nombreuses années. Quelles sont ses principales missions ? Quel rôle joue l’association pour faire évoluer les bonnes pratiques ?
L’Alliance HQE-GBC est née, comme Qualitel mais un peu plus tard, sous l’impulsion de l’État, avec pour ambition de structurer les filières du bâtiment et de l’aménagement autour d’une exigence de qualité durable. Qualitel en est d’ailleurs un membre fondateur, et joue un rôle historique dans la gouvernance de l’Alliance HQE-GBC.
Notre mission est de rassembler l’ensemble des acteurs du cadre de vie durable, promoteurs, bailleurs, industriels, entreprises, architectes, aménageurs, collectivités, experts, etc., pour
- faire émerger des cadres communs ;
- soutenir les bonnes pratiques ;
- accélérer la transition environnementale dans le bâtiment.
Nous réalisons cette mission à toutes les étapes du cycle de vie du bâtiment et lors de l’aménagement, dans une vision multicritère, transversale et globale, alliant qualité de vie, respect de l’environnement, performance économique et management responsable.
Nous agissons à la fois comme lieu d’expertise technique, laboratoire d’innovation collective, plateforme collaborative et nous sommes force de proposition pour les politiques publiques.
Notre rôle est donc double : animer la montée en compétence d’une filière, et faire en sorte que les exigences environnementales, sanitaires, sociales et économiques soient pensées ensemble, au service d’un habitat plus durable et plus désirable.
Quelles sont les principales attentes de vos partenaires, notamment ceux du secteur du logement ?
Les acteurs du secteur du logement, promoteurs, bailleurs sociaux, maîtres d’ouvrage, maîtres d’œuvre, doivent répondre à des attentes environnementales croissantes, à la fois réglementaires, économiques, sociétales et liées aux attentes des habitants.
La performance énergétique des bâtiments a certes fait un bond énorme ces 25 dernières années mais ils souhaitent que la performance ne soit pas réduite à l’énergie.
L’adaptation au changement climatique et la résilience deviennent des prérequis incontournables au service de l’humain, du bâtiment, du vivant et des territoires.
Dans cette logique, la prise en compte de la santé et de la qualité de vie des habitants s’impose également comme un enjeu central, que ce soit en matière de confort thermique, en hiver mais aussi, de plus en plus en été au vu des vagues de chaleur de plus en plus intenses et fréquentes, en privilégiant les solutions fondées sur la nature pour lutter contre les îlots de chaleur.
La qualité de l’air intérieur est également un élément fondamental tout comme le confort acoustique. Le problème acoustique reste l’une des 2 grandes difficultés rencontrées par les Français, quel que soit leur âge, selon le baromètre de Qualitel de 2024. De gros progrès restent également à apporter en matière de qualité d’ambiance intérieure du logement et d’accès à la lumière naturelle.
Sans oublier le défi majeur que représente la rénovation des logements. La massification de la rénovation globale doit être privilégiée et soutenue pour :
- accélérer la sortie des passoires thermiques ;
- gagner en performance qu’il est nécessaire de pouvoir garantir ;
- éviter les pathologies du bâtiment ;
- permettre de plus grands gains économiques.
Mais, pour cela, les dispositifs réglementaires et financiers ont besoin d’être maintenus, simplifiés et certainement mieux ciblés.
Enfin, il est important de souligner que les acteurs du logement attendent aussi de la cohérence entre les démarches – entre la réglementation, les référentiels, les certifications – et un cap clair pour l’avenir.
NF Habitat-NF-Habitat HQE, fête ses 10 ans. En quoi cette certification est-elle un levier efficace pour garantir la production de logements de qualité ?
Les certifications NF Habitat et NF Habitat HQE s’inscrivent dans une démarche de progrès continu et constituent aujourd’hui une référence de qualité reconnue dans le secteur du logement, tant pour la construction neuve que pour la rénovation.
Elles représentent un gage de fiabilité pour les occupants, acheteurs et collectivités en demande croissante de la garantie de logements plus sains, confortables, économes en énergie et respectueux de l’environnement.
Elles permettent aux acteurs de structurer leurs démarches autour d’un référentiel de qualité, robuste, développé en lien avec les professionnels du secteur et contrôlé par des tierces parties indépendantes et de valoriser les efforts de ceux qui vont au-delà des obligations minimales.
Ce qui fait la force de NF-Habitat et à fortiori de NF Habitat HQE en particulier, c’est son approche globale, structurée autour de 4 engagements clés que sont :
- la qualité de vie ;
- le respect de l’environnement ;
- la performance économique ;
- la responsabilité sociétale ;
et un nouvel engagement :
- le respect des exigences de la taxonomie européenne.
Enfin, elles valorisent les projets immobiliers et constituent pour les professionnels un levier de différenciation et de confiance, auprès des acquéreurs comme des collectivités.
Rencontrez-vous encore des freins, techniques ou économiques, à la promotion et acceptation, par les acteurs du secteur, des normes ou certification comme NF Habitat ?
Comme pour toute démarche de transformation profonde, il existe encore des freins, qu’ils soient techniques, économiques ou culturels, et notamment sur les projets de rénovation. Mais ces freins s’estompent à mesure que les acteurs découvrent les bénéfices très concrets d’une démarche qualité.
D’un point de vue technique, la certification NF Habitat HQE exige une approche globale structurée et exigeante de la qualité environnementale, qui suppose une montée en compétences de l’ensemble des intervenants sur un projet : maîtres d’ouvrage, architectes, entreprises, bureaux d’études, exploitants, etc. L’accompagnement opérationnel et de proximité que propose Cerqual est essentiel.
Sur le plan économique, certains pensent encore que viser la certification coûte nécessairement plus cher. En réalité, quand elle est intégrée dès la phase de conception, la démarche HQE permet souvent d’optimiser les choix techniques et de réduire les coûts d’exploitation, tout en valorisant l’actif immobilier.
Le vrai enjeu est de raisonner en coût global (construction, entretien, usage, déconstruction), plutôt qu’en coût initial. Cela nécessite une évolution culturelle de l’acte de bâtir.
Par ailleurs, dans un contexte de tension économique pour le secteur, certains acteurs peuvent être tentés de faire l’impasse sur la certification pour réduire la facture à court terme. Il faut donc continuer à démontrer que NF Habitat HQE n’est pas une « surqualité », mais une garantie de durabilité, de confort et de performance, qui répond aussi aux attentes croissantes des usagers, des collectivités, et des investisseurs.
Enfin, le levier réglementaire joue un rôle important. La montée en puissance de la RE2020, l’intégration des critères de la taxonomie européenne ou encore les exigences de financement vert contribuent à faire évoluer les mentalités.
On sent un mouvement de fond vers plus de qualité et de responsabilité, et la certification HQE est clairement un outil pour accompagner cette évolution.
Les secteurs de l’immobilier, de la construction et des infrastructures vont-ils selon vous rencontrer de nouvelles évolutions environnementales dans les prochaines années ? Si oui, lesquelles ? Y sont-ils préparés ?
Oui, et ces évolutions sont déjà à l’œuvre. La question de l’adaptation au changement climatique devient centrale, car les crises et catastrophes nous obligent à adresser ces sujets.
Nous allons devoir apprendre à concevoir des bâtiments capables de résister à des vagues de chaleur, à des précipitations extrêmes, à des îlots de chaleur urbains, à l’évolution de la biodiversité ou des usages.
Ce sera, je le crains, un nouveau changement de paradigme : il ne s’agira plus seulement de réduire notre impact, mais de rendre nos bâtiments et nos territoires plus résilients.
Il est certain que ça peut sembler lourd alors que la RE2020 est encore en cours d’appropriation. Pour autant, les réflexions sur l’adaptation vont aussi rendre justice aux services rendus aux territoires et aux habitants lors des crises. On sortira des logiques de « réduction sur tous les fronts » des mécanismes d’atténuation, pour aller vers les externalités positives du bâtiment, véritable maillon des chaînes de résilience lors des crises.
Sans se précipiter mais sans traîner, il faut qu’on avance au bon rythme. C’est tout le sens des expérimentations volontaires que nous menons au sein du projet CAP2030 que nous co-pilotons et qui réunit l’ensemble des acteurs volontaires pour défricher ces nouveaux sujets et bâtir progressivement une culture commune de l’adaptation.
Quels sont les prochains défis et projets de l’Alliance HQE-GBC ?
Tout d’abord nous nous réjouissons de constater que l’approche multicritère que l’Alliance HQE-GBC prône depuis sa création, il y a bientôt 30 ans, se démocratise et est aujourd’hui adoptée par de plus en plus d’acteurs.
Ensuite, nous continuons à défricher de nouveaux sujets. Nos défis sont à la fois techniques, culturels et politiques.
Nous poursuivons le développement d’outils partagés par tous autour de :
- l’adaptation ;
- la qualité de vie dans le bâtiment ;
- la gestion durable des ressources ;
- la biodiversité au sein de nos différentes commissions – planification, adaptation, rénovation, CAP2030, aménagement, HQE pour tous …
Parmi les travaux en cours, nous pouvons mentionner l’expérimentation autour de l’outil GEMME pour évaluer la circularité des bâtiments, l’élaboration d’un cadre de définition pour la gestion intégrée des eaux pluviales (GIEP) qui proposera une vision alternative de la GIEP en favorisant une gestion surfacique des eaux pluviales la plus écologique possible, basée sur la nature et le paysage ou encore la rédaction d’un cadre de définition de la rénovation multicritère intégrant les enjeux d’adaptation climatique, de santé, de vieillissement, et de performance réelle.
Toutes nos actions restent résolument inscrites dans une logique de filière.